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 Ressources philosophiques | Dossier
 le travail la technique

édition originale 26-08-2002
actualisée le 13-12-2008

Notions

  • Comment définir la technique ? En première approximation, la technique désigne tout mode d'action efficace sur le monde pouvant faire l'objet d'un apprentissage, d'une transmission, d'une tradition. En parlant ainsi, on en fait "l'axe horizontal" (= "matériel") de la culture humaine - "l'axe vertical" étant spirituel (la religion, l'art, la philosophie...). A ce titre, elle est un critère fondamental de l'hominisation (= processus évolutif qui a conduit au cours des temps à l'espèce humaine actuelle) et du développement humain.
  • Le travail est ce mode d'action sur le monde empruntant des moyens techniques par lequel les hommes produisent leurs moyens d'existence. Le travail a inévitablement une dimension sociale : on ne travaille pas seul et seulement pour soi, et le travail implique donc l'échange.

Problèmes

  1. La technique est-elle spécifi-quement humaine ?

Certains animaux ne sont-ils pas, à leur façon, des techniciens ? La technique n'est-elle pas, au contraire, une manifestation spécifiquement humaine ? Mais si tel est le cas, comment alors comprendre la place de la technique ? D'où vient que nous sommes "techniciens" ? Quelle nécessité proprement vitale pouvons-nous invoquer pour rendre compte de la dimension technique de l'intelligence humaine ?

  1. La technique et le travail sont-ils sans noblesse ?
Si la technique a vraiment l'importance que nous lui attribuons, comment comprendre le mépris dans lequel on l'a si souvent tenue ? Primitivement, la technique vise, il est vrai, l'action, et l'action implique le geste, donc la main, et donc le corps, chose méprisable : telle est la trajectoire de la pensée qui en vient au mépris du travail manuel. Dans l'Antiquité, la vie laborieuse est réservée aux esclaves, véritables "outils vivants" (Aristote). Mais l'activité technique n'est manifestement pas que manuelle. Et surtout, le travail manuel lui-même n'implique-t-il pas toujours aussi l'intelligence ? Bref : la technique est-elle vraiment sans noblesse ? Et le travail lui-même n'a-t-il de valeur que par ce qu'il "rapporte" (= le salaire...) ?

  1. Le progrès technique est-il le progrès de l'homme ?
La notion de technique est irrésistiblement associée à l'idée de progrès... Précisons : progrès de l'efficacité des moyens. Ce qui implique deux questions :
  1. Le progrès technique doit-il être vu comme une progression continue ? L'histoire des techniques est-elle évolution ou révolution ? En particulier, les modes techniques de production apparus au cours de l'ère moderne ne signalent-ils pas un changement radical dans la définition même de la technique ? Celle-ci est-elle le moyen par lequel l'homme s'adapte à la nature, ou bien le moyen par lequel l'homme transforme la nature au point de l'adapter à ses besoins ?

  2. S'il est vrai que le développement humain est solidaire du développement technique, est-il pour autant légitime d'en conclure que les progrès des techniques sont des progrès humains, c'est-à-dire des progrès de l'homme, et des progrès pour l'homme ?

  1. La technique a-t-elle réponse à tout ?
Plus précisément, ne faut-il pas s'interroger sur la finalité de l'action technique. Après tout, la technique n'est qu'un moyen : peut-elle nous guider aussi dans la détermination des fins ? La technique est-elle la solution à tous nos problèmes ? Un monde plus technique est-il un monde plus heureux, plus juste et plus libre ? Que faut-il attendre au juste de la technique ?

  1. Le travail n'est-il qu'une contrainte ?
Considérons cette formule, qu'on attribue à Boris Vian : "Le travail , c'est ce qu'on ne peut pas s'arrêter de faire quand on a envie de s'arrêter de le faire." ... Est-ce seulement de l'humour ? Un amateur joue au football, quand il le désire. Il s'arrête d'y jouer dès qu'il n'en a plus envie. Un footballeur professionnel est également un joueur, mais en cette matinée glaciale de décembre, a-t-il vraiment envie de se rendre sur le terrain d'entraînement ? Le travail est donc une contrainte, même si, parfois, on peut prendre plaisir à travailler : un jour ou l'autre, le travail le plus passionnant, le plus gratifiant, peut aussi se révéler éprouvant, énervant, éreintant : ce jour là, il faut encore travailler. Et bien sûr le travail de la plupart des hommes est loin d'être passionnant, gratifiant : le travailleur ne loue-t-il pas sa force de travail, et cette force n'est-elle pas alors une simple marchandise transformant l'homme, en quelque sorte, en objet ?

Pourtant, le travail n'est-il que peine et aliénation ? N'est-il que contrainte subie ? L'homme peut-il se réaliser sans s'en donner la peine, et la liberté exclut-elle vraiment toute contrainte ? Est-il si absurde de voir en l'activité laborieuse l'instrument d'une libération ?

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