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La messagerie de Philia![]() édition originale 16-03-2003 actualisée le 12-05-2008 |
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From Appletree@..., étudiante en anglais, le 02/05 et le 09/05/2005 : "Je voudrais savoir comment vous définiriez le positif et le négatif (sans toutefois se contenter du sens 'hégélien' du négatif mais en étant plus général). Merci beaucoup par avance... Cette interrogation m'est venue en lisant une citation de Paul Valéry : « Impossible à penser, le négatif est admirable » ". |
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=> 14/05/05 : Bonjour Appletree. Pardon pour ce retard. J'ai été et je suis toujours débordé. Votre question devrait peut-être plutôt s'adresser à un "littéraire". Les termes positif et négatif ont en effet de multiples usages philosophiques, mais je crois que la citation que vous avez relevée porte sur un aspect de la poétique de Victor Hugo, donc que ce n'est pas un "mot" à proprement parler philosophique, même si, il est vrai, elle peut d'abord donner à penser dans ce registre-là, et pourrait alors avoir une portée philosophique. Je ne suis donc pas très compétent pour vous répondre précisément, mais je veux bien essayer tout de même : 1) On peut d'abord penser à la "valorisation" du "négatif" par Hugo, dans ses poèmes et ses romans. Où il est question d'animaux "vulgaires" ou "dégoûtants", l'âne, le crapaud..., mais aussi de personnages monstrueux, misérables (ah les Misérables !), à la frontière de l'humain (Quasimodo dans Notre-Dame de Paris, ou Gwynplaine dans L'homme qui rit)... 2) Mais en fait, il pourrait "tout simplement" s'agir d'une allusion à l'utilisation par Hugo de certaines figures de rhétoriques jouant sur le contraste des termes employés appelées oxymores. Sur la définition de l'oxymore, avec quelques exemples, voyez ce bref article de Wikipédia. Plus précisément, il pourrait s'agir d'un jugement portant sur des oxymores mettant en oeuvre des "images visuelles", ce qui en interdirait, de fait, toute représentation. "Impossible à penser" voudrait donc dire impossible à imaginer, à se représenter en images. Voyez par exemple, dans Le Crapaud (Légende des Siècles, II) : "lumière auguste des ténèbres...". Petite étude ici ou là. Pour étayer cette version, on peut trouver la phrase que vous citez sur internet, mais sous une forme un peu différente : « Impossible à penser, ce négatif est admirable », ce qui laisse à penser que Valéry n'évoquerait pas "le négatif", en général, mais ce négatif-là - suggéré par une image particulière, dans un poème, probablement. Je n'en sais pas plus, car je n'ai pas pu retrouver la référence exacte chez Valéry. 3) Enfin, il est curieux de noter que V. Hugo s'est intéressé de près à la photographie, et, surtout... aux négatifs. Ainsi, "c'est dans certaines techniques de dessin, dont le polymorphe Victor Hugo est l'un des meilleurs représentants, que l'on trouve le parallèle le plus évident à l'inversion de type photographique et par conséquent à la négativation [...] celui qui envisageait d'illustrer ses oeuvres de photographies, se livrait à des évocations spirites et écrivait « je suis fait d'ombre et de marbre », ne pouvait ignorer la nature de ses manipulations répétées et leur force symbolique" (trouvé dans la revue Etudes photographiques, précisément dans un article de Michel Frizot intitulé L'image inverse). Pour ce qui concerne enfin votre demande du 03/05 : "Je consulte régulièrement votre site, qui me semble vraiment bien fait et apporte conseils et aide sans aucune condescendance (chose assez rare parmi les gens détenant un certain savoir). Je viens de lire un message dans lequel il était question de 'changer d'opinion' et vous faisiez référence à Alain, qui abordait la question des opinions (et la façon dont nous les défendons de manière quasi-viscérale). Pouvez-vous me dire dans quel texte il aborde ce sujet ?"... Pour le texte en question, c'est facile : ma réponse comportait un lien qui vous a tout simplement échappé... Il suffit de cliquer sur le nom de l'auteur, comme ici. Je faisais allusion à la fin de ce petit texte d'Alain, qui dit qu' "il n'est point de vérité qui subsiste sans serment à soi ; d'où l'on vient à considérer toute opinion nouvelle comme une manoeuvre contre l'esprit." C'est bien vu. Et bien dit, n'est-ce pas ? Merci de votre appréciation... positive. |
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From Appletree again, le 15/05/05 : " Bonjour. Me revoilà, toujours taraudée par le négatif / positif. J'ai lu un article dans l'Encyclopedia Universalis sur le concept d'opposition. Il parlait de cette notion de négatif (au sens philosophique) en montrant l'évolution de Kant à Hegel en passant par Shelling et Fichte, dont les réflexions seront primordiales pour les 'découvertes' de Freud (concept de résistance notamment). Vous évoquiez les sens philosophiques du négatif et du positif, pourriez-vous m'en dire plus ? Ce concept est souvent utilisé dans une optique hégélienne mais cela semble réducteur, n'est-ce pas ? De Kant à Freud, pouvez-vous me dire ce qui est en jeu dans le négatif. Est-ce la séparation réel (actualisé) / latent, réel / imaginaire, réel / possible ? J'ai étudié la question du Sublime pour mon mémoire de maîtrise. Pourrait-on dire que le sublime nous met en présence du négatif, d'une limite idéale vers laquelle on ne peut que tendre (je pense souvent à l'image mathématique d'une fonction tendant vers l'infini) ? Dans cette optique, la citation de P. Valéry prendrait une autre résonnance car le sublime n'est il pas un non-imaginable - et non un non-pensable ? Il me semble qu'il y a là un lien que j'ai peine à me formuler. Merci beaucoup pour vos suggestions." From Appletree, again & again, le 16/05/05 : "Je réfléchis sur le statut ontologique (reprenez-moi si mon usage du terme est inexact, je ne suis pas philosophe de formation) des choses. Je lisais Mrs Dalloway de V. Woolf. L'auteur y fait dire à son héroïne que les pensées qui se forment en elle sont en quelque sorte réelles, même si au sens strict elles ne le sont pas. Comment décider qu'une chose est réelle ou ne l'est pas ? L'objectivité est-elle un critère stable ? D'ailleurs est-elle possible puisque ce que je perçois est l'image que je me construis d'une chose et non pas cette chose en elle-même ? Les créations artistiques, qui ajoutent au monde puisqu'elles créent quelque chose qui n'existait pas sont-elles réelles ou pas ? Je sais que c'est une question délicate sur laquelle il n'y a pas de consensus et c'est tant mieux car cela permet de penser (on trouve sur cette question ceux qui disent que non dans ce cas ces entités n'existent pas et ceux qui, adoptant une approche psychologique, disent que tout ce que l'on ressent, pense... existe). J'aimerais juste avoir votre point de vue. Cette question en entraîne une autre : est-ce la perception par une conscience qui fait l'existence de quelque chose ? Que deviennent les choses quand nous ne les percevons pas (a fortiori quand nos capacités humaines ne sont pas adaptées à leur perception, je pense à l'infiniment grand et à l'infiniment petit) ? Pourriez-vous me guider dans ma réflexion personnelle et désintéressée ( je n'ai pas de dissertation à écrire ni de note à la clé...) ?". Et le 17/05 : "Une dernière question, avant de vous laisser tranquille pendant longtemps. Je considérais le rôle mineur accordé à la négation par certains philosophes, qui lui réservaient juste le rôle d'éviter l'erreur. Et j'en suis venue à m'interroger sur la portée d'une définition négative. Sur beaucoup de sites, j'ai rencontré cette idée selon laquelle une telle définition est au mieux fort insuffisante, au pire inutile. Cela ne me semble pas être le cas. Ne peut-on pas reprendre cette idée 'saussurienne' d'une négativité des choses (ie n'existant que les unes par rapport aux autres ?). J'admets volontiers que l'utilisation de la négation dans le raisonnement peut n'être que transitoire, une manière de faire un certain tri dans ses idées et d'arriver à une forme de définition plus positive. Cependant, à moins de dénier la désagréable réalité de nos limites humaines, ne faut-il pas reconnaître que certaines choses sont quasiment impossibles à définir de manière positive, en particulier tout ce qui a trait à la transcendance ? Mais même sans aller jusque là, certains états d'âme, ressentis... nous forcent à les identifier négativement par rapport à ce qu'ils ne sont pas ('ça n'est pas de l'amour, ni de l'amitié, il y a de l'admiration et du respect...') ? |
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=> 14/05/05 : Rebonjour Appletree. Difficile de vous répondre dans les limites étroites du cahier de Philia. Très difficile, et d'ailleurs vos interventions très suggestives le disent bien : s'interroger sur la négation / le négatif, c'est s'interroger sur... à peu près tout. La vie et la mort, l'amour et la haine, la réalité et la pensée, le rêve et la réalité, la pensée et le langage,... On le voit bien aussi à la lecture de l'article que vous évoquez (Encyclopedia Universalis), fort intéressant au demeurant - encore qu'il s'agisse du concept d'opposition, et non de négation. Il paraît difficile de "faire le tour" de tels concepts si généraux, qui semblent doués d'un don d'ubiquité étonnant. Il faudrait certainement de nombreux colloques pour y voir plus clair. Les intervenants devraient venir de tous les horizons : philosophes, mais tout aussi sûrement, psychanalystes, linguistes, anthropologues, logiciens, et même mathématiciens, physiciens,... Et songeons qu'il serait très possible d'écrire une thèse sur le négatif dans la Science de la logique de Hegel ! Bref, vous m'avez piégé. Je me bornerai donc à vous proposer quelques éléments, non pas de réponse, mais de réflexion, prolongeant les pistes que vous avez indiquées :
Voilà. J'espère que c'est un peu plus que du bavardage. Encore que. Comme on dit : à vous de juger. Avec toutes mes... |
-: Amitiés :- P h i l i a.
Référence du message : ID 066
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