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 COURRIER

édition originale 16-03-2003
actualisée le 12-05-2008

Faut-il toujours faire ce qu'on dit ?...
04/01/2007

De patrick17, étudiant, le 04/01/2007 : "Bonsoir. Je m'y prends relativement à l'avance car la dernière fois vous n'aviez pas eu le temps de me répondre (mais vous m'aviez fait des excuses... et je sais que vous n'êtes pas un "un vieux monsieur oisif retraité de l'enseignement" — citation de Philia).

Mon sujet de dissertation est :
Faut-il toujours faire ce qu'on dit ?

Voilà mes idées :

Je pense pour illustrer qu'on doit toujours faire ce qu'on dit analyser
L'Apologie de Socrate. Sinon, je pense qu'on ne fait pas parfois ce qu'on dit par intérêt (exemple de Don Juan). De plus, on nous apprend dès l'enfance que la dissimulation, la fausseté, l'hypocrisie, la sournoiserie sont laides. Figure du menteur : le diable qui ne fut pas pour rien représenté par un serpent, c'est-à-dire par l'animal à la langue fourchue.
En outre, si on ne fait pas ce qu'on dit, on ruine l'essence même de la parole qui est la confiance. Tout acte de parole promet la vérité. La société des hommes deviendrait vite infernale, si chacun devait se méfier de chacun.
Enfin, concernant la politique, je ferais une analyse du chapitre XVIII du
Prince de Machiavel (ouvrage que j'ai lu et qui m'a plu), sur la fidélité à la parole donnée: il y a un écart entre les idées et les faits en politique, écart qui se vérifie en particulier vis-à-vis du problème de la fidélité à la parole donnée. Le prince doit savoir bien user de la bête et de l'homme (renard et lion). Machiavel insiste sur la ruse, la ruse portée à sa forme extrême : l'infidélité à la parole donnée, mais une infidélité habilement dissimulée (= le parjure + la dissimulation du parjure).

Qu'en pensez vous ? Je n'arrive pas à trouver une 'bonne' problématique...
Merci d'avance de votre aide.
"

=> 06/01/07 :
Bonjour Patrick. Je vous réponds en faisant ce que j'avais dit, savoir vous répondre... Pardonnez-moi toutefois si c'est un peu rapidement car j'ai du pain sur la planche avant de reprendre, lundi — à l'aube hélas ;-(

Comme vous l'avez compris, votre sujet implique manifestement de réfléchir aux fins ou aux raisons : en effet, pourquoi ne pas faire ce qu'on a dit qu'on ferait ? Si on ne fait pas ce qu'on dit, à quoi bon le dire ? Et si on dit qu'on fera ce qu'on fera, pourquoi ne pas le faire ? Il ne faut pourtant pas beaucoup de temps ni beaucoup de connaissance des choses humaines pour s'apercevoir que bien des hommes ne tiennent pas leurs promesses. Or, cela paraît condamnable, bien sûr. Kant nous expliquerait d'ailleurs qu'il est de notre devoir de respecter nos promesses, et, comme le suggère la question ("Faut-il toujours..."), de persévérer dans ce respect, quoi qu'il nous en coûte : la voix du devoir m'impose en effet de "toujours me conduire de telle sorte que je puisse aussi vouloir que ma maxime devienne une loi universelle" (Kant). Il semble d'abord prudent d'adopter cette règle de conduite en considérant que je risque bien plus en perdant la confiance d'autrui "que tout le mal que je songe en ce moment à éviter" en ne tenant pas ma promesse.
Mais cette conception conséquentialiste est rejetée par Kant. En effet, remarque-t-il, "si je suis infidèle à ma maxime de prudence, il peut, dans certains cas, en résulter pour moi un grand avantage, bien qu'il soit en vérité plus sûr de m'y tenir." Aussi, "si une promesse trompeuse est conforme au devoir, le moyen de m'instruire le plus rapide, tout en étant infaillible, c'est de me demander à moi-même : accepterais-je bien avec satisfaction que ma maxime (de me tirer d'embarras par une fausse promesse) dût valoir comme une loi universelle (aussi bien pour moi que pour les autres) ? Et pourrais-je bien me dire : tout homme peut faire une fausse promesse quand il se trouve dans l'embarras et qu'il n'a pas d'autre moyen d'en sortir. Je m'aperçois bientôt ainsi que si je peux bien vouloir le mensonge, je ne peux en aucune manière vouloir une loi universelle qui commanderait de mentir ; en effet, selon une telle loi, il n'y aurait plus à proprement parler de promesse, car il serait vain de déclarer ma volonté concernant mes actions futures à d'autres hommes qui ne croiraient point à cette déclaration ou qui, s'ils y ajoutaient foi étourdiment, me payeraient exactement de la même monnaie : de telle sorte que ma maxime, du moment qu'elle serait érigée en loi universelle, se détruirait elle-même nécessairement.
" (même référence). Faire suivre ses paroles de l'action qu'elles promettent est donc un devoir moral absolu (rationnel - pratique), et non une simple règle de prudence (empirique - pragmatique), qui serait, "généralement" avantageuse, et dans quelques cas désavantageuses au point qu'on n'ait pas à tenir sa promesse (= tu ne mentiras... point trop souvent !) : nous ne pouvons transiger avec ce devoir universel sans quitter le terrain de la morale et de la vertu (au sens aristotélicien de disposition habituelle à s'efforcer au bien).
...C'est pourtant justement ce que Machiavel envisage, au nom de la raison d'Etat, et, plus précisément, de la paix et de la sécurité civiles, valeurs absolues qui transcendent non seulement le point de vue des individus mais aussi les implications morales qui découlent des relations interindividuelles. La politique n'est pas la morale, et, comme vous le soulignez bien, le souverain (le Prince au sens de Machiavel) doit situer son devoir au-dessus des devoirs particuliers des citoyens : les princes charmants ne font pas nécessairement de bons princes... Certains diront à coup sûr que cette immoralité n'est pas acceptable. Machiavel leur répondrait, tout aussi sûrement, que le Prince n'a que des sujets, que c'est "le vulgaire" qu'il lui faut gouverner, et que la foule, qui n'est pas éclairée, ne juge que par les apparences : il suffit donc au Prince de donner le change, en travaillant son image, comme on le dirait aujourd'hui, et peu importe qu'il tienne ou non ses promesses ("Choses promises, choses promises !"), du moment qu'il aura agit prudemment au moment où il les aura faites, ce qui se révélera dans l'instant aussi bien que dans les temps qui suivent, au moment où la foule ne se rappelera plus très bien quelles étaient ces promesses. La fin justifie les moyens.
On note toutefois que Machiavel conseille au souverain de tâcher de ne pas divulguer son privilège : signe, à l'évidence, que la morale est du côté de la promesse tenue, et que la parole donnée doit valoir comme engagement : "Choses promises, choses dûes !" Le droit d'outrepasser le devoir de tenir sa promesse doit donc pouvoir être, littéralement, justifié par des impératifs réellement supérieurs.

Ces quelques réflexions vous paraissent-elles suggestives ? Je vous souhaite une belle année, et bon courage pour la suite. Pensez à donner de vos nouvelles.

P.S. : Voyez aussi le message suivant : "faire ce que l'on pense" ne vaut-il pas mieux que dire ce que l'on est et comment on fait ? => Epictète, Ne te dis jamais philosophe...


-: Amitiés :- P h i l i a.

Référence du message : ID 115

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