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édition originale 16-03-2003
actualisée le 12-05-2008

Suffit-il d'être logique pour bien raisonner ?...
03/09/2008

03/09/2008 : De Remsdu28 => « Bonjour ! Vous allez bien ? Alors voilà, j'ai un sujet de philosophie : Suffit-il d'être logique pour bien raisonner ? à rendre dans deux semaines. J'ai quelques idées sur ce sujet mais c'est confus, et comme c'est la première fois que je fais une dissertation en philosophie c'est pas trop mon truc car je suis en terminale S... Je voudrais quelques conseils pour bien cibler ce sujet qui aborde la question de la logique et de la raison. Je me pose ces questions : est-ce qu'un raisonnement est toujours basé sur la logique ? Peut-on raisonner sans être logique ? Un raisonnement est-il incorrect lorsqu'il n'est pas logique ? Ce serait très aimable de votre part de me répondre parce que je suis un peu perdu... Merci d'avance et merci pour l'aide dont vous nous faites profiter. »

=> 14/09/08 : Bonjour cher Remsdu28. On ne peut pas dire que votre professeur ait tardé pour vous donner un sujet de dissertation à traiter — et aussi : avouez que vous portez un drôle de nom !...

Tâchons d'abord de répondre à vos questions :

  • « Est-ce qu'un raisonnement est toujours basé sur la logique ? »
    Non : un discours logique est un discours "raisonné", mais un raisonnement peut très bien être illogique.

  • « Peut-on raisonner sans être logique ? »
    Oui : voir ci-dessus (...en fait c'est la même question !).

  • «Un raisonnement est-il incorrect lorsqu'il n'est pas logique ? »
    Votre sujet suggère que oui. En effet, la formulation «
    Suffit-il » laisse entendre qu'il faut être logique pour bien raisonner : c'est le présupposé du sujet, et on peut penser qu'il est acceptable... ou alors il faudrait répondre non à la question précédente !

Il faut donc à coup sûr faire preuve de logique pour bien raisonner. A ce stade, tout semble simple : je suis logique, donc je raisonne bien, c'est-à-dire correctement. Votre sujet demande pourtant si cette précaution est suffisante, laissant par là entendre qu'il se pourrait qu'une autre (ou : que d'autres) condition(s) que l'usage de la logique serai(en)t nécessaire(s) pour qu'on puisse vraiment convenir que le raisonnement est correct / satisfaisant... Voilà un sérieux motif d'étonnement : en effet, un discours logique n'est-il pas un discours qui satisfait aux exigences de rigueur du raisonnement ? Pourquoi diable être plus exigeant ?

Pour y voir plus clair, il faut donc se demander ce qu'il convient de qualifier de logique. Or, comme vous le savez sûrement, la logique est la science du raisonnement. Or — pour aller vite — qui dit science dit vérité, et "donc" (?) on peut penser que celui qui raisonne de façon logique raisonne correctement... Comme vous pouvez le constater, en parlant ainsi, nous n'avançons pas d'un pouce ;-((

...Ou plutôt, en parlant ainsi, nous comprenons que nous ne pourrons répondre que oui à la question posée, et qu'il faut donc aller plus loin. Comment cela (me demanderez-vous) ? Tout simplement en nous demandant ce que la logique établit concernant le raisonnement. En l'occurrence, il faut se demander si la logique, qui — comme on vient de le rappeler — dit la vérité sur les raisonnements, suffit à dire la vérité.

Un petit exemple ( intégralement copié - collé depuis Philia ! ) devrait nous aider à mieux comprendre : considérez le procès intenté à Galilée, qui prétend que la terre est une planète, qu'elle navigue autour du soleil et aussi qu'elle tourne sur elle-même : Galilée n'a vraiment aucune "preuve" de ce qu'il avance — seulement des "indices". Mais l'Eglise, qui conteste sa "théorie", a des raisonnements à lui opposer. Par exemple, elle fait remarquer que si la terre, telle une toupie, tournait vraiment sur elle-même (= rotation) et si, de plus, elle se déplaçait autour du soleil (= révolution), un vent dominant violent devrait être observé par la fenêtre. Or on ne fait pas l'expérience d'un tel vent dominant violent en regardant par la fenêtre, donc... Donc la terre est immobile. Cette conclusion est logique. Pourtant, vous le savez bien, elle est fausse, et nous avons donc là un exemple type d'une démarche logique qui "ne raisonne pas bien".

Pourquoi ? Parce que la logique est une science formelle : elle porte sur la forme des raisonnements, non sur le contenu des énoncés qui les composent. Elle énonce les lois de l'entendement, non les lois de la nature : elle est, comme dit Kant, « un art universel de la raison, celui d'accorder des connaissances en général à la forme de l'entendement » (Logique, p. 11). A ce titre, elle ne peut jouer le rôle d'un outil de découverte pour la connaissance, mais seulement servir « à l'appréciation critique et à la rectification de notre connaissance » (p. 12) : elle tient, dit Kant, le rôle d'un canon, sans jamais vraiment pouvoir être un organon. Plus simplement : elle ne nous apprend rien, mais permet seulement de nous assurer que nous ne délirons pas, que nous avançons en pensée avec rigueur. C'est pourquoi un homme sain d'esprit peut commettre des fautes de logique, tandis qu'un fou peut raisonner logiquement sans jamais faiblir.

Résumons-nous brièvement :

  1. Certaines vérités peuvent être connues sans raisonnement : je n'ai pas besoin de raisonner pour établir que le soleil se lève.

  2. Certains raisonnements sont illogiques. Ils conduisent d'ordinaire à des conclusions inadéquates.

  3. Certains raisonnements, bien que logiques, ne conduisent pas à la vérité : la seule logique ne me permet pas de déterminer si le lever du soleil que je viens d'observer s'explique par l'ascension du soleil (ce qui conduit à penser que le soleil est en mouvement autour de la terre qui est immobile) ou bien par le basculement vers le haut de l'horizon terrestre (ce qui conduit à penser que la terre est en mouvement autour du soleil qui est immobile).

Il vous reste à parler de ce qui fait défaut au raisonnement seulement logique pour être correct — c'est-à-dire la prise en compte du "contenu", et les nombreux "détours" de la connaissance par l'observation, la vérification des faits. Pour cela, l'histoire des sciences (voir par exemple cet article de Wikipedia sur l'héliocentrisme) devrait vous mettre sur la voie.


-: Amitiés :- P h i l i a.

Référence du message : ID 128

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