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Le 15/03, de Kartapus, désormais abonnée à Philia : "C'est encore moi... Tout d'abord merci d'avoir répondu si explicitement à ma dernière question ! J'ai bien lu vos conseils quant à la demande d'aide au devoir, c'est pourquoi je me permet de vous soumettre une question : L'art peut-il se passer de références à la beauté ? ainsi que les résultats de mon travail, pour le soumettre à votre jugement... Bien sûr une fois de plus ce travail est urgent... C'est la dure vie des hypokhagneux... Je propose de vous remettre plus tard le corrigé complet du devoir que vous pourrez ainsi intégrer sans effort dans votre site ? Je ne vous achète pas... n'allez pas croire que cela puisse remplacer ma carte bancaire !! [Chère Kartapus, je n'ignore pas qu'il existe des sites de philosophie qui diffusent des corrigés en ligne sans l'accord de leur auteur, mais cela me paraît profondément malhonnête. Ce sera donc avec plaisir, mais bien sûr avec cet accord... ] Voici les résultats de mon travail :
I _ L'art ne peut pas se passer de référence à la beauté
- Définition des termes du sujets
[...]
- L'art est lié au beau par nature
_ Beaux Arts : fonction de l'art est de créer le beau
_ Le beau est ce qui différencie l'art de la technique
_ Historiquement :
Antiquité : Art = reproduction du beau de la nature. Beau = Bien. Le beau est dans la monde donc dans l'art puisque l'art est imitation ou reconstruction de la nature.
XVIII e siècle : Art = Beau. Romantisme : Montrer que le beau relève du sensible individuel, il est enraciné dans la subjectivité humaine. Le beau et l'art coïncident alors.
De plus, le beau ne peut être qu'une représentation humaine puisqu'elle est réfléchie.
- La fonction de l'art est de recréer la réalité
_ Créer une oeuvre
_ Réinterpréter la vie, la laideur pour nous donner les moyens de la supporter puisque esthétique donc le rôle de l'art est d'embellir la vie
_ Rôle d'éducation morale et sociale de l'art, créer des formes de civilités. Contrôle les gens, les modère dans leur comportement les uns envers les autres…
Nietzsche
- Conclusion : L'art doit être beau pour être de l'art
Transition : Si l'art est le culte de l'illusion, est-il nécessaire ?
Si le beau est la seule fonction de l'art, alors il a peu d'intérêt, la surprise du spectateur va diminuer ainsi que le plaisir.
Le beau est il nécessaire, indispensable à l'art ?
II - L'art doit se passer de toutes références à la beauté
- Le beau ne caractérise pas l'art
Le beau ne suffit pas à caractériser l'art, les 2 concepts sont dissociables puisqu'on retrouve le beau ailleurs que dans l'art (dans la nature) et l'art représente parfois la laideur pour la dénoncer.
De plus l'expérience artistique n'est pas forcément agréable, cf. le plaisir négatif de Kant.
- La beauté est qqch. de subjectif et changeant
_ Dépend des cultures, des époques, on ne peut pas la définir absolument et pour toujours (cf. le déterminisme)
_ Pas de norme de goût, multiplicité des sensibilités, le goût s'éduque, il est collectif et contagieux (cf. les phénomènes de modes)
- Une des fonctions de l'art est de révéler la vérité
_ L'artiste donne sa vision du monde, sa propre réalité donc pas forcément le beau
_ L'art ne doit pas imiter la nature mais faire qqch qui soit sien (Hegel)
_ Révélation de la vérité, de tout ce que Nietzsche cachait. Importance du sens implicite de l'oeuvre, révélation de soi. Sollicitation de l'esprit, du sensible spiritualisé
_ l'art moderne : liberté et réalité de l'homme donc pas forcément beau, refus de toute norme esthétique. Fonction = troubler la conscience
III - ???
Si pas le beau à quoi se réfère l'art ?
Merci d'avance une fois de plus..."
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=> 18/03/04 :
Chère Kartapus, vous avez déjà bien oeuvré, et l'ensemble paraît déjà très prometteur ! Voilà pour mon jugement. J'ajouterai ces quelques pistes :
- Je me demande si vous exploitez suffisamment la formulation : " peut-il se passer de références à ". La formulation du sujet doit être vue comme une perche tendue au rédacteur de la dissertation : or je ne suis pas sûr que vous vous en empariez vraiment. Le sujet aurait pu en effet être formulé autrement, plus simplement, par exemple : L'art ne vise-t-il que la beauté ? Votre question est cependant plus évasive, donc en un sens moins contraignante, et elle peut donc suggérer autre chose : l'art ne peut-il pas en effet faire référence à la beauté sans vraiment viser la beauté, ni dans la chose représentée ni dans la représentation elle-même ? La notion de référence pourrait, par exemple, renvoyer à l'idée d'évocation, voire de simple clin d'oeil... Le pluriel peut d'ailleurs renforcer cette suggestion : ainsi, certaines oeuvres modernes ne sont-elles pas provocatrices par référence à l'idéal classique du beau ? On peut aussi relever " peut-il se passer de "
, comme si la chose était difficile, voire impossible, alors même que l'oeuvre ne se donne pas comme belle...
- Une autre remarque, peut-être plus importante : en fait vous ne semblez pas vraiment prévoir de parler de la beauté de façon détaillée − sauf peut-être dans vos définitions au début, mais probablement de façon brève seulement. Ne serait-ce pas pourtant, sinon nécessaire, du moins utile, pour déterminer si l'art peut se passer de faire référence au beau... ? Pensez par exemple aux 4 "moments" par lesquels Kant (dans la Critique de la faculté de juger) entend définir le beau. Contester le "lien" entre l'art et le beau, ce serait alors s'en prendre à chacun de ces aspects : (1) le beau objet d'une satisfaction désintéressée, (2) obtenue sans concept, (3) sans que la fin soit considérée, et (4) reconnu comme objet d'une satisfaction nécessaire. On pourrait alors estimer que l'art ne pourrait se passer de références au beau qu'en étant "impur" (au sens de Kant), c.-à-d. comme visant (1) l'agrément, la jouissance sensible, la sensualité, sans égard pour la dimension contemplative du jugement esthétique "pur". L'art pourrait encore, pour échapper à cette relation , (2) être conceptuel, valoir avant tout comme message, voire comme instrument de propagande. Il pourrait aussi (3) être lié à l'utilité, être l'ornement des choses fonctionnelles, et cela (4) sans vraiment prétendre valoir nécessairement et universellement. Ou encore : l'art romprait avec l'idéal du beau intemporel, avec le projet de sauver les apparences fugitives (voir ce texte de Hegel) en produisant des oeuvres elles-mêmes éphémères. Ou encore : l'art cesserait de procurer une satisfaction. Etc. Peut-être alors serait-ce une façon d'évoquer l'art moderne, dont l'ambition n'est plus, comme c'était sans doute le cas dans le passé, de "tenir l'équilibre" entre le sensible et le spirituel. Voir ce texte de Hegel sur la "mort" de l'art (entendu comme kunstreligion) : à la fin, l'art se moque de l'art (auto-dérision), ou prétend se représenter à lui-même (dans "l'art conceptuel", ou dans "l'abstraction", cette "école de peinture" dont Cl. Lévi-Strauss disait que "chaque artiste s'évertue à représenter la manière dont il exécuterait ses tableaux si d'aventure il en peignait"...).
- De façon plus classique, comme vous l'écrivez (II.3), l'art a une mission spirituelle dans la mesure où il exprime l'esprit dans une forme sensible. On peut alors invoquer la philosophie de Hegel (l'art comme conscience de soi sensible de l'humanité), mais aussi, dans un sens assez différent, celle de Bergson (l'art comme oeuvre de l'esprit visant le dévoilement du réel)... Probablement, d'ailleurs, en ferais-je une IIIe partie. En évoquant alors en II notamment la contestation de la référence au beau par l'art moderne (avec toutefois le paradoxe déjà souligné d'une contestation par référence). En effet, on peut admettre que le beau n'est qu'une catégorie esthétique parmi d'autres sans pour autant estimer que l'art puisse faillir à sa mission : à savoir être ce produit de l'esprit qui s'adresse à l'esprit à travers des formes sensibles. Qu'en pensez-vous ?
En espérant avoir pu contribuer à vous "inspirer", je vous adresse toutes mes amitiés.
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=> 24/03/04 :
Chère Kartapus, je ne reproduis pas intégralement votre dernier essai, reçu hier. Juste le plan (avec les "bilans-transitions"), auquel j'ajoute mon "grain de sel"...
Votre nouveau plan :
I - L'art a une finalité purement esthétique
Bilan transition
L'art ne peut se passer de références à la beauté qu'en étant impur selon kant. Si le beau est la seule fin de l'art la liberté de l'artiste ne s'en trouve t elle pas considérablement réduite ?
II - Finalité spirituelle de l'art
PROBLEMES : le fait il au moyen de la beauté ? Peut il le faire autrement ? Vérité et beauté sont-elles dissociables dans l'art ? Qu'est ce qui distingue l'art des autres formes de pensées ? S'il a une but, une utilité, en quoi est il toujours de l'art ? L'art peut se passer de références à la beauté pour exprimer des idées au plus proche de la vérité, mais il se confronte alors au risque de ne plus être de l'art !
III - Finalité esthétique de l'art dissociable de l'idée de beau
L'art a une finalité esthétique puisqu'il cherche à toucher notre sensibilité, mais pas toujours liée à l'idée de beauté.
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...Juste une remarque :
Le moment que vous placez en III n'expose-t-il pas une limite à la thèse exposée en I ? Si tel est bien le cas, pourquoi ne pas plutôt adopter l'ordre I - III - II ? C'est-à-dire : I mais III, et malgré cela II.
...Pour le corrigé proposé par votre professeur, je suis évidemment preneur du plan ! Ma réticence à publier in extenso le corrigé tient toujours, mais je ne pense pas que proposer ici le plan aux visiteurs de Philia constituerait un acte de "pillage" médiatique !
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