=> 20/10/2003 : Eh bien, chère Amandine, vos désirs sont des ordres. Mais pour les satisfaire tout à fait, c.-à-d. pour nous prouver vraiment votre reconnaissance, veuillez nous confier le n° de votre carte bleue. Si possible aussi, veuillez nous expédier votre kartapus, sous pli recommandé ;-))
Sérieusement, je vois que vous êtes restée 16 minutes et 46 secondes chez Philia (j'ai des indics), preuve que vous avez vraiment à coeur de réussir.
"Peut on penser sans préjugés ?"... C'est un joli sujet. Il faut évidemment se demander ce qu'est un préjugé. Ainsi, pour Kant, "Le préjugé est la tendance à la passivité, donc à l'hétéronomie de la raison ; et le plus grand des préjugés consiste à se représenter la nature comme n'étant pas soumise aux règles que l'entendement, de par sa propre loi essentielle, met au principe de la nature : - c'est la superstition." (Critique de la Faculté de juger, §. 40). Il vous faudra aussi sans doute examiner quels sont les "déterminants" des préjugés, et là vous n'aurez que l'embarras du choix pour ce qui est des références, puisque tous les philosophes ont dénoncé des préjugés (par exemple Platon, Descartes, Spinoza, Nietzsche, Husserl, Alain, Bachelard...). C'est bien normal, vu que la philosophie est une activité critique. Il y a ainsi une jolie classification des préjugés chez Francis Bacon. Il les appelle les idoles, et les classe en quatre catégories : les idoles "de la tribu", les idoles "de la caverne", les idoles "de la place publique", et les idoles "du théâtre". Cette typologie des préjugés pourrait vous servir de fil conducteur : peut-on en effet vraiment se débarrasser de tous nos préjugés ? En bref, il me semble que vous pourriez vous poser ces quelques questions pour faire progresser votre réflexion :

1) Que sont les préjugés ? Comment se forment-ils ? En quel sens ils parasitent la pensée et font courir à l'esprit d'importants dangers ?

2) Quels remèdes peut-on alors (s')administrer pour les éradiquer ? (Bacon, p.ex., avant Descartes, propose de guérir des préjugés grâce à une méthode).

3) Cependant, la pensée ne doit-elle pas continuellement oeuvrer pour extirper les préjugés ? Faut-il croire que nous pouvons nous débarrasser de toutes nos croyances ? Descartes, dans ses règles de la méthode, affirme qu'il faut, pour bien penser, "éviter la précipitation et la prévention". Mais Descartes n'a jamais pu penser que le vide était possible dans l'univers : Pascal a-t-il eu raison d'évoquer "Descartes, inutile et incertain" ? On peut sans doute se soigner, mais peut-on jamais définitivement guérir des atteintes des préjugés ? Mais alors, si tel est le cas, quelle attitude adopter ?

4) Vous pourriez aussi terminer en "chamboulant" la question : Finalement, n'y a-t-il pas de bons préjugés ? ...Après tout, votre examinateur ne devra-t-il pas, au moment où vous commencerez votre exposé, s'armer d'un préjugé favorable ? De même, les principes de la morale, les postulats des sciences (ou même la simple croyance dans le pouvoir explicatif des sciences), ne sont-ils pas des sortes de pré-jugés ? Dès lors, faut-il absolument s'efforcer de se débarrasser de tous nos préjugés ?

N'oubliez pas de procéder aussi avec des mots-clés : préjugé / prénotion / présupposé / postulat / principe, méthode (voir plus haut), réflexion, (auto)critique, raison, problème / problématisation, doute / scepticisme / suspension du jugement, croyance / opinion / opinion droite, évidence, illusion, superstition...

En espérant que ces modestes indications pourront vous aider, au moins un peu, je vous souhaite...

-: Bon courage, avec mes...