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édition originale 16-03-2003
actualisée le 12-05-2008

A qui reconnaît-on des droits : à l'individu ou au citoyen ?...
28/02/2004

Flo, qui s'inquiète pour son sujet de dissertation : "A qui reconnaît-on des droits : à l'individu ou au citoyen ?" [ ...Flo, vous avez écrit : "à qui se reconnaît-on des droits... ?" Je suppose que c'est une coquille. N'est-ce pas ? ] nous fait part de ce qu'elle a déjà découvert :

"J'ai tout d'abord défini les termes suivants :

  • Citoyen : membre de la communauté politique qui se définit à la fois par le libre exercice de ses droits politiques et par sa participation aux décisions de l'Etat, au nom de la volonté générale. On n'est citoyen que dans une république ou une démocratie. En France : droit de vote pour les femmes en 1945.
  • Individu : être humain indépendant et autonome, ayant des intérêts et des droits éventuellement en opposition avec ceux de la société ou de l'espèce. Il ne faut pas confondre individu et personne morale : le principe de la personne morale est l'identité consciente et volontaire. Quand on parle d'un individu, on met l'accent sur les particularités ou les différences qui le distinguent de tout autre.

J'ai ensuite défini le droit. J'ai aussi parlé des droits naturels de l'homme aux [= pour les ?] droits du citoyen. Et de la nature aux [= pour les ?] droits naturels de l'homme. Je voulais donc savoir si j'étais dans la bonne voie. Mais dans une dissertation, il faut bien peser le pour et le contre ?! Et aussi poser une problématique ? Pouvez-vous m'aidez sur ce point SVP !!! Merci de votre aide."

=> 04/03/04 :

  1. Pour analyser le sujet utilement :

    Les définitions que vous proposez paraissent globalement correctes (à part votre dernier §., j'avoue). Pourtant, analysez-vous entièrement l'énoncé ? => "A qui reconnaît-on... ?" ...

    1. En effet, il faudra sûrement se demander, à un moment ou à un autre de la réflexion, et donc de la dissertation, ce que peut impliquer ou supposer le verbe reconnaître dans un tel contexte : le droit a-t-il d'ailleurs vraiment besoin d'être "reconnu" pour être droit ? De quel droit faudrait-il qu'il le soit ? D'autre part, reconnaître des droits, est-ce seulement les faire valoir comme droits ? Le droit est en effet à distinguer et même à opposer au fait. Dès lors, que vaut cette reconnaissance abstraite ? C'est une critique qu'on a pu adresser aux Droits de l'Homme : ces droits sont seulement "déclarés" (voyez l'intitulé : "Déclaration des droits de l'homme & du citoyen", DDHC en abrégé), ce qui signifie que les signataires de ladite déclaration les considèrent comme des finalités, des objectifs, des principes qu'ils approuvent moralement mais qu'ils n'impliquent aucune obligation juridique positive. La DDHC n'a donc pas force de loi : elle "reconnaît" seulement que les hommes / les citoyens ont certains droits, et qu'il "faudrait" en effet que les Etats les fassent respecter. Mais, d'une part, ce n'est pas toujours possible, notamment pour des raisons économiques : ainsi, le droit à l'éducation, le droit au travail, peut toujours être "déclaré", cela n'implique pas qu'ils puissent être réellement promus par les Etats - même les plus riches d'entre eux. Plus radicalement, Marx estime que les DHC ont une fonction purement idéologique : en fait, ils ne garantissent rien du tout, et énoncent seulement des valeurs égoïstes bourgeoises. Donc oui, des droits sont "reconnus", mais cette reconnaissance est purement formelle, comme dit Marx, et en réalité il ne s'agit que de défendre des ntérêts de classe. Ainsi, le droit à la "liberté", défini comme le droit de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, serait en fait surtout le droit de se désintéresser du sort des autres hommes ; le droit à la propriété, de même, serait seulement le droit de jouir de ses biens égoïstement, sans se soucier des inégalités (et de leur reproduction, à travers l'héritage ou l'éducation) ; enfin, le droit de sûreté serait en réalité le droit d'exiger de l'Etat qu'il garantisse cet égoïsme ! Lecture conseillée : La question juive, de Marx : "On fait une distinction entre les droits de l'homme et les droits du citoyen. Quel est cet homme distinct du citoyen ? Personne autre que le membre de la société bourgeoise..."
      Pour d'autres (philosophes "conservateurs", surtout anglais : Burke, Bentham...) la DDHC est d'abord "fanatique" : en prétendant seule être fondée sur la Raison (avec un grand R), elle laisserait la porte ouverte à l'arbitraire, à l'intolérance, à tous les abus, non seulement ceux des Etats (pensons à la Terreur), mais aussi aux individus, qui pourraient s'en servir pour ne respecter aucune loi, aucune coutume acquise par les peuples au fil de l'histoire. D'ailleurs, les DHC sont inefficaces : par exemple, ils n'ont pas entraîné la suppression de l'esclavage dans les colonies (Burke).
      Vous pouvez peut-être penser, chère Flo, que ceci "nous éloigne du sujet"... En fait, pas du tout, et même au contraire, car dans votre réflexion sur cette question, il faut aussi que vous vous demandiez pourquoi il y aurait à reconnaître des droits, s'il est utile qu'ils soient "reconnus", de quelle façon ils peuvent - ou doivent - l'être... Sans quoi vous risquez de ne pas comprendre vraiment pourquoi il y aurait à choisir entre les droits du citoyen, membre d'un Etat (littéralement : d'une Cité), et les droits de "l'individu", de l'homme "en tant qu'homme" - autrement dit vous risquez de ne pas bien comprendre l'intérêt de la question et le problème qu'elle implique.

    2. De même, vous auriez intérêt à vous intéresser au "on" qui serait susceptible d'opérer cette reconnaissance : est-ce l'Etat ? ou une convention / une déclaration internationale (par exemple la DDHC) ? ou les citoyens ?... ou les individus ? Historiquement, la DDHC est ,de ce point de vue, paradoxale : elle déclare en effet que les hommes ont des droits imprescriptibles, inaliénables, à la fois comme individus (droits naturels) et comme citoyens (droits civiques) ; elle va jusqu'à affirmer que les "droits subjectifs" des hommes (= ce qu'ils revendiquent universellement comme droit) ne doivent pas rester cantonnés abstraitement dans le "droit naturel", mais doit passer dans le "droit positif", c'est-à-dire dans le droit réel, dans les lois, au point, même, d'être élevés au-dessus du pouvoir des Etats, dont ils bornent le pouvoir... Et cependant, ce ne sont ni "les citoyens" ni "les individus" qui font cette déclaration : c'est l'Assemblée Nationale française, en 1789 (avant de devenir le Préambule et le Titre Premier de la Constitution en 1791)... En d'autres termes : c'est l'Etat qui déclare les droits de l'homme, et qui les déclare comme des principes supérieurs (remarquez, à cet égard, la mention "sous les auspices de l'Etre Suprême" dans le préambule de la Déclaration) qui doivent éclairer et gouverner l'Etat .

  2. Quel est donc le problème ?

    En apparence, votre sujet est un sujet "ouvert" (voir cette notion par ici), c'est-à-dire une question à laquelle on ne peut répondre directement ni par oui ni par non ("A qui... ?"). Cependant, elle indique aussi deux thèses : A = c'est au citoyen (sous-entendu : et pas à "l'homme") qu'on reconnaît des droits, et B = c'est à l'individu (sous-entendu : pas au citoyen) qu'on reconnaît des droits. Inutile donc, de "fermer" la question pour y voir plus clair, puisque le sujet n'est ouvert qu'en apparence : reformulé de façon explicitement fermée, votre sujet est donc
    "Reconnaît-on des droits au citoyen ou à l'individu ?"

    Le problème consistant dans un choix difficile - en apparence même impossible - entre deux thèses, il vous faut donc tâcher d'abord d'opposer le citoyen et l'homme, du moins dans votre introduction. Par exemple, en considérant le citoyen comme membre de droit de tel ou tel Etat, et l'individu comme homme, indépendamment de son appartenance à tel ou tel Etat définissant tel ou tel type de citoyenneté. Ainsi donc, en un sens [= thèse A], seul le citoyen a des droits, parce que le droit n'existe que par l'institution des lois par les Etats, lois qui, précisément, définissent la citoyenneté : le droit, c'est ce que dit la Cité, ce que disent les Etats ; c'est le droit positif, c'est-à-dire les lois. L'homme ne peut donc se prévaloir d'un droit naturel qu'il aurait en tant qu'individu... Cependant, les lois sont-elles si justes qu'elle interdisent à l'homme de revendiquer un tel droit naturel ? Allant plus loin, n'est-ce pas à l'individu et à l'individu seulement [= thèse B] qu'il faut reconnaître des droits ? ...Mais l'individu peut-il légitimement revendiquer des droits qu'il n'aurait pas en tant que citoyen et se prévaloir ainsi d'un droit différent de celui que l'Etat définit comme son droit propre ? Y a-t-il lieu de distinguer ainsi l'individu du citoyen ? A plus forte raison, y a-t-il lieu d'opposer leurs droits ?

  3. Quelques pistes pour une solution :

    Les deux thèses ci-dessus évoquées paraissent défendables :

    [A] Le droit n'est-il pas (par définition) une chose sociale ? Dès lors, comment spécifiquement reconnaître un droit à l'individu ? En d'autres termes, n'est-ce pas au citoyen et au citoyen seulement qu'il faut reconnaître des droits ? Un tel droit de l'individu serait en effet un droit naturel : mais quelle légitimité accorder à la nature (qui n'est jamais qu'un fait) ? Ainsi, quels droits reconnaître à l'individu essentiellement mû par des intérêts égoïstes ? L'idée de droit individuel est donc une abstraction : on ne peut faire droit à l'individu en tant que tel sans contradiction.

    [B] Pourtant, qu'est-ce qui au juste est objet du droit ? Ce qui relève de la vie sociale. Le droit, en effet, en tant que législation, n'a pas à s'immiscer dans tous les aspects de la vie privée de l'individu. Toute la question est alors de déterminer la frontière entre la vie sociale et la vie individuelle (voir l'histoire tragique d'Antigone). Néanmoins, sur le principe, on doit bien reconnaître à l'individu le droit à une vie privée, dans la mesure, bien sûr, où elle ne contrevient pas aux lois qui regardent à la vie commune. .

    [C] Synthèse : (1) Mais, précisément, ces droits individuels ne sauraient être préservés que si le droit, c'est-à-dire la loi, le reconnaît expressément. Par suite, il faut être citoyen pour avoir avoir la garantie de ses droits individuels. (2) Ne faut-il pas alors, pour être tout à fait juste, reconnaître une valeur à l'idée d'un droit universel des individus par-delà leur citoyenneté, ce qui reviendrait à affirmer la nécessité d'une citoyenneté universelle ? (3) Cependant, n'oublions pas que ces droits individuels ne sont jamais que des droits, c'est-à-dire des exigences légitimes, non des réalités effectives : le droit de voyager, par exemple, c'est-à-dire la liberté de circulation des hommes, suppose des loisirs et des moyens financiers. S'il est donc essentiel de proclamer et de reconnaître des droits au citoyen, et, par là, aux individus, il n'est pas moins capital de promouvoir activement leur exercice effectif.

En espérant, chère Flo, vous avoir été de quelque utilité, recevez toutes mes...


-: Amitiés :- P h i l i a.

Référence du message : ID 027

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